HAUTE JOAILLERIE 2025 : ÉCLATS D’AUDACE ET FORMES EN LIBERTÉ
En juillet, la semaine de la couture à Paris offre aux maisons l’occasion de dévoiler leurs collections de haute jo, qui mêlent cette année formes radicales, pierres éclatantes et récits intenses.
Graff, une ode aux sixties avec 1963
Présentée la semaine dernière à Paris, la parure 1963 signée Graff rend un hommage éclatant à la décennie de naissance de la maison et l’esprit de liberté, de glamour et d’impertinence des Swinging Sixties. Collier, bracelet et boucles d’oreilles composent un triptyque d’une parure hypnotique, sertie de 7790 diamants ovales, baguettes et ronds, pour plus de 129 carats au total. La monture en or blanc de chaque pièce se trouve ponctuée d’une ligne d’émeraudes pavées à peine visible qui se révèle tout en délicatesse. Un détail qui n’en est pas un, le témoin de la signature chromatique de la maison : l’éclat du vert made in Graff. Entre psychédélisme et rigueur géométrique, 1963 incarne l’audace d’une époque effervescente, mais aussi le savoir-faire et la maîtrise technique de l’atelier londonien qui souligne la beauté de chaque pierre. Chaque pièce est une construction en tension, entre abstraction visuelle et obsession du détail. François Graff la qualifie lui-même de « parure parmi les plus complexes et ambitieuses jamais réalisées ». Un manifeste joaillier qui célèbre autant le passé flamboyant de la maison que son avenir, taillé dans la lumière. Un style résolument Graff.
Tasaki : une collection qui fait corps avec les pierres

La maison japonaise Tasaki a levé le voile sur une collection de haute joaillerie à laquelle on ne s’attendait pas. Pour la première fois, la perle, fétiche et signature historique de la maison, partage la scène avec les quatre autres gemmes précieuses : diamant, rubis, émeraude et saphir. Chacune se voit consacrer une parure complète, sans pour autant s’acoquiner aux perles comme la maison nous y avait habitué. Inspirée par la nature, les cultures et les traditions joaillières ancestrales, la collection joue sur les contrastes entre lignes architecturales et sensualité organique. Symphonie de lumière, dont le collier est entièrement composé de diamants marquise et poire, célèbre le feu glacé de cette pierre précieuse dans ce qu’il a de plus technique, de plus pur : une démonstration du savoir-faire diamantaire de la maison. Avec Rouge sublime, Tasaki embrasse la force primitive du rubis, pierre de passion et d’amour, entièrement sertie, et dont la profondeur est accentuée par l’or blanc. Une composition audacieuse et puissante. Plus mystérieuse, la parure Éveil de la nature convoque les émeraudes dans une évocation végétale et apaisante, en hommage à une forêt vue comme un refuge apaisant. Mystère bleu, probablement la plus graphique, décline le saphir dans une vision Art déco à la géométrie ciselée.

La perle, enfin, dans Grâce Éternelle, est mise en duo avec des diamants jaunes, symboles de lumière et de vitalité, pour une parure qui célèbre la transmission, la douceur et l’intemporalité. Cette collection est à l’image de Tasaki : discrète en apparence, mais parfaitement construite, avec toute l’exigence et la rigueur de la maison japonaise dans le choix des gemmes et son exécution sans faille.
Chez Buccellati le bijou se fait sac
Si la maison nous a dévoilé de superbes pièces mettant en avant son iconique tulle ou « nid d’abeille », technique ajourée particulière qui a fait sa renommée dans le monde entier, elle nous a réellement surpris en proposant une collection capsule de trois sacs bijoux très originaux inspirés de ses archives. Avec ces trois pièces uniques, Buccellati réactive un pan méconnu mais profondément ancré de son histoire : celui des pochettes de soirée précieuses, initiées dans les années 1920 par Mario Buccellati, le fondateur de la maison. Entre hommage patrimonial et geste créatif contemporain, Andrea Buccellati, son petit-fils, revisite ces objets d’exception en les transposant dans une grammaire moderne. Broderies somptueuses, fermoirs joailliers, velours sculpté et pierres précieuses (rubellites, diamants, or jaune gravé) composent un triptyque raffiné. La première de ces merveilles est une pochette matelassée en velours vert à fermoir orné d’une tourmaline rubellite cabochon. La seconde est une bourse en velours noir dont le fermoir est orné de diamants et de tourmalines rubellites, sublimée par un petit pendentif Opéra. La troisième, plus moderne, est un mini sac sphérique doté d’une anse jonc en or jaune et pavé d’une double rangée de triangles et de guirlandes de diamants. Ces pièces témoignent d’un artisanat porté à son sommet, où l’innovation épouse la mémoire de l’orfèvrerie italienne. Un art de la métamorphose, à la croisée de la joaillerie, de la couture et de la sculpture.
Avec Terres d’Instinct, Messika retourne à la source du diamant

Pour célébrer ses vingt ans, Messika a misé sur Terres d’Instinct, une collection de haute joaillerie sculptée dans la lumière brute de l’Afrique australe. Inspirée par un voyage en Namibie, la créatrice Valérie Messika a capturé l’énergie tellurique du désert, la majesté animale, les ocres vibrants et les contrastes saisissants de cette terre berceau du diamant. Au total, ce sont seize parures puissantes, libres et sensuelles, mêlant or, diamants, pierres de couleur et prouesses de modularité. L’une des pièces phares, la parure Kalahara, se distingue par ses deux diamants jaunes, dont une pierre de près de 35 carats. Véritable prouesse de sertissage et de modularité, le collier se porte de quatre façons : plastron triple rang, double rang, choker ou ras-de-cou à pendentif central. Pour la première fois, Valérie Messika a intégré pleinement les gemmes colorées à son langage joaillier (saphirs, rubis, émeraudes, spinelles, grenats, onyx…) comme un prolongement naturel des émotions inspirées par la savane. Entre griffures de lion (Fauve), souffle du désert et ondulations sur les dunes de sable (Mirage), zébrures stylisées (Zebra Mnyama) et éclats flamboyants, la collection impose une nouvelle écriture esthétique, instinctive et affranchie, fidèle à l’ADN Messika. Tout au long de la collection, la lumière des diamants tisse le récit. Magnifiée par des techniques de sertissage variées (serti masse, neige, entourage écrin, taille coussin, baguette ou cœur), chaque pièce témoigne du savoir-faire diamantaire de la maison.
Shapes of Extraleganza de Piaget, la haute joaillerie entre art et design
Deuxième volet d’une trilogie entamée en 2024, Shapes of Extraleganza propulse Piaget dans une odyssée joaillière inspirée des années 1960 et 1970, où l’art, le design et la haute joaillerie fusionnent. La collection 2025 explore de manière surprenante, tout en étant parsemée de repères chers à la maison, les jeux de formes et de volumes. Carrés, triangles, zigzags, vagues, cercles, et spirales psychédéliques sont imbriqués, superposés les uns aux autres, et se chahutent joyeusement dans 51 créations graphiques et sculpturales. Références au pop art, à l’Op Art et à la Piaget Society de Warhol et Dali, elles ponctuent un ensemble de parures mêlant modernité et dimension culturelle. Les créations entremêlent des techniques et matériaux emblématiques de Piaget, les pierres ornementales ou minérales d’une grande variété côtoient le célèbre et iconique Décor Palace dans une chorégraphie colorée parfaitement maîtrisée. Piaget y révèle toute l’étendue de son savoir-faire, de la mécanique à la joaillerie la plus expressive et joyeuse. Et c'est justement par son identité d’horloger-joaillier que la maison se distingue : la preuve avec des montres manchettes qui abritent un mouvement manufacture automatique au calibre extra-plat, une première pour une montre de haute joaillerie. Point d’orgue de cet hommage au mouvement : Endless Motion, une horloge mobile conçue comme une œuvre cinétique, signée par l’artiste français Alex Palenski.